Les caps fuient le regard des équipages

GAM 2019
ÉTAPE 4

Après une nuit venteuse, les participants se préparent pour l’étape Marathon. Le bivouac s’active en cacophonie. Exercice pliage de tente pour tout le monde. Le petit déjeuner vite avalé, les conseils de Ludovic en tête, il est temps de reprendre la route, sans retour au bivouac. 250 km de défis attendent les Gameurs sur ces deux jours. Les casques sur la tête, les participants reçoivent un à un, une demi-bouteille de champagne, offerte par le partenaire Tsarine. « C’est pour bien profiter de cette nuit en autonomie dans le désert. Amusez-vous !» lancent les organisateurs. Un geste particulièrement apprécié par les équipages. Un petit clin d’œil pour les encourager et c’est parti pour 48 heures de folie.

Au programme : s’en prendre plein les yeux et aussi plein les jambes. Pour la première journée, les équipages traversent l’oued Ziz et l’oued Rhéris où ils vont affronter un terrain semé d’embûches : barres rocheuses, végétation malicieuse, passages boueux, vallées caillouteuses. À chacun sa route, à chacun sa peine.   

Cap ou pas cap

Les longs kilomètres n’épargnent pas les équipages qui redoublent d’efforts pour déjouer les pièges de la piste et se sortir de situations à faire pâlir un dromadaire. Si le CP1 est presque un jeu d’enfant, les difficultés ne se font pas attendre. Armelle de l’équipage 137 (Armelle Medard Lang / Mourad Majoul - AVICO) tente de convaincre son pilote de rejoindre le CP2, face aux reliefs noirs qui font obstacle. « Regarde là-bas, monte tout en haut à pied pour tâter le terrain. Moi, je n’emmène pas ma jeep là-bas, même si ça passe ! On tire à droite ». Un peu plus loin, l’équipage 108 (Thierry Fresard / Pascal Pozzo Di Borgo - ALATA vermouth) qui a grappillé la 5e place pour l’étape des dunes avoue que la navigation s’annonce sportive. « Nous avons bien analysé les cartes, les reliefs montagneux sont partout. La stratégie du jour : reprendre les caps à tour de bras », explique Thierry, au volant. Quant à l’équipage 124 (Jane Bottan / Antoine Bottan - ATOMIC NEON), ils sont inquiets. « Aujourd’hui, nous sommes sur le parcours B, mais là nous ne rencontrons que des équipages sur le parcours A. On se pose des questions, mais dans tout les cas, on va au cap », explique le couple, déjà habitué à la boussole, qui, la veille, a abîmé le pont avant de son véhicule. « On a rejoint le bivouac avec uniquement les deux roues arrières qui fonctionnaient. L’atelier mécanique a été efficace. Les quatre roues sont opérationnelles mais nous avons toujours une appréhension surtout pour franchir des pistes compliquées », explique Antoine. Trouver le bon cap est donc essentiel pour éviter les complications. Entre le CP3 et le CP4, des paysages sont à couper le souffle à travers une grande vallée qui borde la montagne Imzizoui (qui signifie « infranchissable ») et laisse sans voix.

Cp coriaces, jardinage en vue

Le jardinage ou encore « chercher son chemin », dans le jargon rallye, est de mise. Les équipages ont tout à coup perdu leur sens de l’orientation entre le CP3 et le CP5.

Le duo 121 (Romain Daviaud / Lucie Marquet - AUTOSPHERE) reconnaît que l’étape n’était pas de tout repos. « Entre le CP3 et le CP4, nous avons trop bifurqué à droite. On s’est retrouvé dans une falaise, et dans un lit d’acacias. Nous avons rayé le 4×4 mais nous ne pouvions pas faire demi-tour. C’était bien plus difficile que les dunes. Nous ne pensions même pas arriver au CP5 ! », explique Romain, le pilote. Certains équipages ont fait l’erreur de vouloir suivre le vol de l’hélicoptère, erreur de débutant.

De leur côté, l’équipage 120 (Franck Schulz / Fabienne Schulz - FRANCK ESPACES VERTS) a trouvé la journée usante « C’était une étape avec beaucoup de franchissements. Pour trouver le CP5, nous avons tiré beaucoup trop loin. Nous nous sommes tankés mais heureusement l’équipage 127 nous a sanglé pour nous tirer de là », explique Franck au volant qui vit ce défi avec sa femme. « Nous étions sur 4 départs de Gazelles et regrettions que ça n’existe pas pour les couples. Désormais, on est là pour nous déconnecter de notre quotidien et pour se prouver qu’on est capables de vivre une expérience comme ça », poursuit-il.

L’équipage 109 (Christophe Casty-Rigal / Marie Fabiani - Fondation ARSEP), a manqué le CP4. « On s’est totalement perdus. On a décidé d’aller directement au 5. C’était trop compliqué », avoue Christophe, qui prend le rôle du pilote. Les caps fuyants ont donc donné quelques frayeurs.

Entre satisfaction et déception

À la balise 5, c’est l’enchantement pour l’équipage 136 (Caroline Venaud / Thierry Venaud). Père et fille décident même de faire un selfie pour graver ce moment dans la pellicule. « On est heureux d’être arrivés ! À un moment on a vu un CP, j’ai crié à mon père que ce n’était pas le nôtre. Entre le CP3 et 4, les équipages sont partis dans tous les sens, c’était vraiment impressionnant. On a suivi une direction, puis on a triangulé plus loin et cette fois nous étions pile dans l’axe pour arriver ici. Aujourd’hui, c’était la journée la plus compliquée, avec des distances particulièrement longues comportant des pistes caillouteuses, des pierres anguleuses, et des reliefs piégeux », explique Caroline, heureuse d’arriver en premier au CP qui, lance à son père « Là on fait nos points et demain, on trace tranquille ».

Installant leur tente, l’équipage 130 (Martin Bazin / Antoine Galano - Fondation ARSEP) est rempli d’entrain malgré une longue journée.« Aprés le CP3, nous cherchions le cap, avec l’équipage 103, tout autant paniqués que nous. Après un report de cap, on s’est retrouvés dans des gorges, mais nous avons dû continuer. On s’est engagés là ou le Raptor n’est pas allé. On a pris des risques, mais nous sommes contents de nous. C’est incroyable ce que le véhicule peut faire. Par contre, nous avons perdu l’équipage 103 qui nous suivait », explique Martin qui va profiter de la soirée, à la belle étoile.

Quant à l’équipage 118 (Pascal BURG / FABIENNE LALANDE BURG - ALL-ROAD EXPERIENCE), cette étape était sans fin. « Du CP3 au CP4, nous avons mis 4 heures au lieu de 2 heures. Tout s‘est décalé toute la journée, surtout que nous avons traversé des reliefs corsés. Nous avons passé notre temps à douter. Et là, nous sommes arrivés de nuit », confie Pascal qui a hâte de souffler. Plus loin, les équipages s’échangent les ressentis de la journée. « C’est un challenge que nous n’avons pas vécu à 100% mais ça marque les esprits », lance l‘équipage 114 (Mikaël Cadio / Damien Arnaud - VICTOIRE), un verre à la main. La nuit peut commencer. Aucun équipage ne pointera la balise 6. Certains même dormiront dans la pampa.

Une soirée conviviale à la belle étoile

Le rideau tombe sur 360° d’immensité, de solitude et de silence. Enfin presque. À mesure que la pénombre gagne du terrain, des tâches de lumières vertes, rouges et jaunes éclosent à l’horizon.

Les Gameurs n’ont pas lésiné sur les moyens pour profiter, les pieds dans le sable, d’un moment plus intime entre teams. C’est le moment de s’accorder du temps, surtout que les équipages ont couru après, toute la journée.

Les tables prennent vie, chacun sort ce qu’il a ramené pour partager avec ses voisins ou ses nouveaux amis de rallye. Tchin-Tchin à la solidarité, à l’amitié et à la témérité. Par ici, c’est une fondue qui se prépare. « Nous voulions marquer le coup, et partager quelques chose de simple avec tout le monde », explique l’équipage 104 (John Chavaz / Jean-Marie Degeneve - TOYOTA DEGENEVE). Quant à Romain (équipage 121), dont ses parents son producteur de Pinault a ramené quelques bouteilles à faire goûter.

De son côté, Fabienne de l’équipage 120 (Franck Schulz / Fabienne Schulz - FRANCK ESPACES VERTS), doit s’habituer aux nuits dans le désert. « C’est une nouveauté pour moi. Toute seule, ça n’aurait pas été possible, mais au final je suis contente ». À côté, son mari lance en souriant « ça a quand même faillit me coûter le rallye ! » Les rires éclatent. La bonne ambiance règne. « Ce soir, on profite, on relâche le stress », entend-on de toute part.

La motivation revient

Le matin, les équipages doivent prendre le départ dès la levée du jour pour rejoindre le CP6 qui est à une quarantaine de km. Les équipages sont requinqués, et ceux qui ont connu une mauvaise journée la veille sont regonflés à bloc. 

Le bivouac sauvage se vide lorsque l’équipage 106 (Anthony Crochet / Guillaume Trignat - Gilles TRIGNAT Résidences) tape la balise. « Nous avons passé la soirée avec les 103, perdus comme nous à 5 km de là.  Nous n’avions pas envie de faire le chemin de nuit et finalement nous avons partagé un très bon moment » explique Anthony, un peu pressé. Comme beaucoup, ils doivent redoubler de vigilance entre le CP5 et CP6 pour franchir une zone avec des reliefs très peu marqués entourés de sable et surnommé « l’enfer des Gazelles ».

Au final les participants auront 9 CP à pointer au lieu des 10 prévus. Le parcours initial, très long a été raccourci par la Direction de course suite à une vitesse de croisière des équipages moins rapide que prévu. Une bonne nouvelle pour certains. « On est rassurés. Hier, c’était assez compliqué, très peu de repères figuraient sur la carte. Là, on retrouve nos esprits, on a bien avancé ce matin, mais si ce soir on descend au classement, nous terminerons le rallye en prenant moins de risque, et en oubliant la gagne. Tout va dépendre des prochaines balises », explique l’équipage 107 (Jennifer KALKA / David D\'ORSI - VULPES ZERDA). De son côté, l’équipage 128 (Guy Leneveu / Christian Poirault - APE ETIQUETTES) a perdu sa première place au classement suite à une erreur stratégique. « On a fait beaucoup de jardinage. On a pris la stratégie la plus courte mais pas la plus simple, on n’aurait pas dû. On a traversé des champs de cailloux, c’était très compliqué », explique Christian, pourtant habitué aux rallyes. De son côté son coéquipier est déçu. « J’en ai mal dormi, mais ça va mieux maintenant »

Le compagnon de route trinque

 Les paysages magnifiques, défilant sous les yeux des équipages, sont coriaces. Les montagnes se dressent au-dessus de l’immensité désertique pareille à des tours de guet. Plaines après plaines, s’étendent jusqu’à l’horizon des ondoiements de dorés, des reliefs sableux coiffés de rochers, des champs de verdure, ou encore quelques villages berbères.

Sur la route, lors du déjeuner au CP7, l’équipage 121 (Romain Daviaud / Lucie Marquet - AUTOSPHERE) a fait un peu de travaux pratique. « Nous avons explosé une jante, on a dû changer la roue. Après une dunette, nous avons buté contre un gros cailloux », détaille Lucie, en lançant un regard complice à son co-équipier. La team 107 (Jennifer KALKA / David D\'ORSI - VULPES ZERDA) qui rejoint le groupe s’écrie « Ce ne sont pas des pierres, ce sont des rochers ! La voiture a pris cher ! ».

Pendant ces deux jours, les équipages ont eu du fil à retordre. Contents de rentrer et satisfaits d’avoir surmonté une bonne dose de challenges.

Au classement provisoire, dans la catégorie 4X4, le 128 a perdu sa place de gagnant. Les 132 prennent donc la première place avec 38,41 points de pénalités. Le second est l’équipage 119 avec 38,66 points de pénalités. Enfin la troisième place semble être tenue par le 108 avec 38,91 points de pénalités. Les écarts entre les trois premiers équipages se situent dans un mouchoir de poche.

Quant aux SSV, au classement provisoire, le 22 remporterait la victoire avec 27,19 points de pénalités, suivi de l’équipage 21 avec 27,45 points de pénalités et enfin du 23 comptant 34,70 points de pénalités.

ÉDITION 2020

31 OCT – 7 NOV

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